Nous avons identifié quatre questions essentielles à se poser et dont les réponses peuvent avoir une incidence forte sur le choix du statut juridique de l’entrepreneur :
- les charges sociales
- la présence d’un investisseur
- l’accompagnement par Pôle emploi dans le cadre de l’ARE
- la visibilité
Les conclusions auxquelles ces raisonnements conduisent se résument de la manière suivante :
- Une personne plutôt éloignée de l’âge de la retraite, quand elle sera en capacité de se rémunérer, aurait intérêt à exercer sous le format SARL (ou EIRL).
À l’inverse, une personne proche de la retraite constituerait une SAS ou une SASU, et la conserverait pendant la retraite. - La présence d’un investisseur à court ou moyen terme induit la constitution d’une SAS ou d’une SASU.
- Si Pôle emploi accompagne l’entrepreneur, ce dernier aura intérêt à constituer une société commerciale, de type SAS (ou SASU) ou SARL (ou EURL), soumise à l’impôt sur les sociétés ;
- Dans la mesure où le créateur d’entreprise doit démarcher des prospects parmi des sociétés publiques, des grands groupes ou des PME importantes, il privilégiera l’immatriculation d’une SAS ou d’une SASU.
Quelle synthèse peut-on produire à partir de ces éléments ?
Les critères les plus importants à intégrer sont : les charges sociales et la visibilité.
En couplant les critères, les schémas suivants peuvent être proposés :
Personne à moins de 10 à 12 ans du départ théorique en retraite
Il s’agit pour eux, de ne pas sortir du régime de la sécurité sociale, version retraite par répartition. En revanche, à quelques années de la retraite, le fait de cotiser sur les régimes obligatoires devient nettement moins rentable, du fait du plafond de la retraite de base.
Forme juridique | SAS ou SASU |
Statut social | Assimilé salarié, rémunéré en salaires |
Capital de la société | Pas de visibilité recherchée : montant faible (800 ou 1 000 € par exemple)Visibilité ou intérêt fiscal : 8 000 à 10 000 € |
Rémunération | Normale jusque vers 60-62 ans, puis baisser les salaires dès que le dirigeant est au plafond de la retraite de base ; ensuite petite rémunération (500 € brut/mois) pour l’acquisition de trimestre et dividendes. Pendant la vie professionnelle, panacher les salaires avec des dividendes. |
Incidence sur le statut social | Au moment où la rémunération dans la société baisse, compléter les cotisations de retraite par capitalisation personnelle (tout en économisant de l’impôt sur le revenu : PERE).Si peu de rémunération dans la société, cotisations faibles en retraite par capitalisation |
Entrepreneurs à plus de 12 ans du départ à la retraite
Un entrepreneur relativement loin de sa date de départ théorique en retraite a tout intérêt à privilégier les cotisations de retraites par capitalisation, plutôt que des cotisations longues et importantes en retraite par répartition.
Ne pouvant s’en exonérer totalement (et c’est heureux que ce ne soit pas possible), le créateur d’entreprise dont la carrière doit durer encore a minima 10 à 12 ans a tout intérêt, pour limiter ses cotisations obligatoires, à préférer un statut où elles sont les moins onéreuses (SARL), tout en cotisant de manière régulière, longue et idéalement soutenue sur des contrats Madelin (régime de retraite par capitalisation, contrats supportés par la société).
Ainsi, nous préconisons l’organisation suivante :
Forme juridique | SARL, EURL OU EIRL |
Statut social | Travailleur non salarié, dépendant de la Sécurité sociale des indépendants (gérée par l’Urssaf depuis 2018). Rémunération de gérance. |
Capital de la société | Pas de visibilité recherchée : montant faible (800 ou 1 000 € par exemple) Visibilité ou intérêt fiscal : 8 000 à 10 000 €. |
Rémunération | À évaluer en fonction de ses besoins. Pas d’intérêt pour les dividendes, malgré la baisse de la fiscalité. |
Incidence sur le statut social | Cotiser dès que possible en retraite par capitalisation dans la société. Panacher (pour des raisons de fiscalité) ces cotisations avec les cotisations déductibles du revenu familial (PERE). |
Cas particulier : quel statut juridique si je perçois l’allocation de retour à l’emploi (ARE) ?
La question du statut juridique est parfois traitée avec appréhension par les entrepreneurs, dans la mesure où beaucoup de fausses idées et de faux raisonnements viennent polluer une approche finalement assez rationnelle.Or dans le cadre d’un accompagnement par Pôle emploi dans la durée (24 ou 36 mois d’allocation ARE), la meilleure organisation est assez simple… et même unique !
Les objectifs poursuivis par un entrepreneur percevant ou susceptible de percevoir l’ARE sont les suivants :
- ne pas remettre en cause le versement de cette allocation ;
- ne pas perdre la sécurité sociale ainsi que la portabilité de la mutuelle et de la prévoyance, accordée pendant 12 mois à l’issue du contrat de travail ;
- continuer à accumuler des trimestres de retraite ;
- continuer à accumuler des points de retraite.
Tout cela est possible pour un entrepreneur qui constitue une société commerciale, de type SAS (ou SASU s’il est unique propriétaire de sa société) ou SARL.
Mais que choisir entre les deux ?
Le statut de SARL est préférable (en l’état actuel des cotisations et de la couverture associée) aux personnes loin de l’âge de la retraite, pour leur permettre précisément de capitaliser une retraite plus importante et à un coût moindre.
En revanche, proche du départ théorique en retraite, la constitution d’une SAS ou SASU est préférable.
Et si le choix définitif se faisait à l’issue du temps d’accompagnement par Pôle emploi ? Donc à la fin de l’ARE ?
Voilà quel serait le schéma juridique :
- Départ de l’entreprise (solde de tout compte).
- Inscription à Pôle emploi et demande du maintien de l’ARE (pas de versement en capital, via l’ARCE).
- Immatriculation d’une SAS (ou SASU pour un entrepreneur unique actionnaire de sa société).
- Gestion de son activité professionnelle pendant 2 ans ou 3 ans (selon les droits acquis).
- À l’issue de la période d’indemnisation de Pôle emploi, l’entrepreneur se pose la question suivante : « À compter de maintenant, SARL ou SAS ? »
Deux cas de figure :
Entrepreneur de moins de 52-55 ans :
Il serait opportun de percevoir une rémunération sous format SARL (ou EURL). Donc ils transforment leur SAS en SARL ; le coût de la démarche est inférieur à 1 000 €.
Avant de procéder aux formalités juridiques (AG et changement des statuts), il peut être intéressant de percevoir des dividendes (avec le bénéfice du prélèvement forfaitaire unique, la fameuse flat tax).
Dans ce schéma, l’optimisation fiscale et sociale est optimum.
Dès la transformation, le nouveau gérant perçoit une rémunération suffisante (sur la base de 6 000 € par an) pour accumuler des trimestres de retraite et ainsi ne pas avoir de période de carence dans l’acquisition de trimestres de cotisations.
En effet, pendant la période de perception de l’ARE, l’entrepreneur est resté couvert (Urssaf et retraite), comme s’il était resté salarié dans son ancien emploi.
En revanche, il devra prendre une mutuelle et une prévoyance personnelle à l’issue de la période de portabilité (qui s’arrête 12 mois après le solde de tout compte).
Il n’est pas intéressant financièrement de se verser une petite rémunération pendant le temps de l’ARE pour pouvoir faire supporter des garanties complémentaires de santé par sa société (création de charges sociales… inutiles).
Autres entrepreneurs :
Il est conseillé de rester en SAS (ou SASU) au moment de commencer à se rémunérer.
Une analyse sur le niveau de rémunération doit être menée afin d’optimiser le coût de la retraite.
À titre d’exemple, cotiser sur une rémunération forte pour un entrepreneur assimilé salarié au sein de sa SAS alors qu’il ne lui reste plus que 3 ou 4 années avant de pouvoir percevoir sa retraite n’est sûrement pas intéressant, en termes de coût des cotisations rapporté au bénéfice en termes de pension de retraite marginale acquise.